En direct des… Jiqhs 2023 – 24es Journées internationales de la qualité hospitalière et en santé – 27-28 novembre 2023 – Fédération hospitalière de France

valérie friot-guichard

valérie friot-guichard

Référente organisation territoriale, qualité, usagers – Fédération hospitalière de France – 1 bis, rue Cabanis – 75014 Paris – France
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Ou comment un éclairage rétrospectif et prospectif accompagné de regards croisés permet de soutenir l’importance de la qualité et de la sécurité des soins dans les parcours de santé, avec une prise en compte croissante de la qualité et de la gestion des risques dans le pilotage stratégique des établissements de santé et dans les dynamiques territoriales

Zaynab Riet, déléguée générale de la Fédération hospitalière de France (FHF), et Pascal Forcioli, président fondateur des Journées internationales de la qualité hospitalière et en santé (Jiqhs) et ancien directeur du centre hospitalier Georges-Mazurelle à La Roche-sur-Yon, ont ouvert l’édition 2023 de ces Journées, qui ont été marquées par la présence du président de la Haute Autorité de santé (HAS), le Pr Lionel Collet. Organisées par la FHF, elles se sont déroulées les 27 et 28 novembre 2023 dans les magnifiques locaux de la Cité internationale universitaire de Paris, avec plus de 350 participants, alternant plénières, tables rondes, conférences et ateliers. « Construire ensemble les différentes briques de la qualité et de la sécurité pour les usagers et les professionnels du système de santé », tel était le thème de ces deux journées choisi par les nombreux partenaires membres du comité scientifique : représentants de la HAS, de France Assos Santé, des fédérations, d’institutions et d’associations (la FHF qui en est l’organisatrice, la Fédération de l’hospitalisation privée [FHP], la Fédération des établissements hospitaliers et d’aide à la personne privés solidaires [Fehap], Unicancer, le service de santé des armées, la Croix-Rouge, l’Institut français de l’expérience patient [Ifep]), ainsi que des organismes qualifiés français ou internationaux (Fédération des organismes régionaux et territoriaux pour l’amélioration des pratiques en santé [Forap], Société française de gestion des risques en établissements de santé [Sofgres], Plateforme pour l’amélioration continue de la qualité des soins et de la sécurité des patients-Brussels Life Science Incubator [Paqs-BLSI]…). L’ouverture de ces journées a porté un regard rétrospectif et prospectif sur la politique qualité.

Les regards rétrospectifs et prospectifs sur la politique qualité

Pascal Forcioli a rappelé que l’histoire de la qualité hospitalière en France était intimement liée au déploiement de l’accréditation puis de la certification des établissements de santé. Dès l’ordonnance de 1996, des journées de réflexion et d’échange sont créées avec la mise en place des nouveaux dispositifs législatifs dans le but de déployer encore plus largement cette culture qualité auprès de tous les professionnels chargés de la politique qualité dans les établissements de santé (Encadré 1).


Encadré 1 – Le fil rouge des Journées internationales de la qualité hospitalière et en santé (Jiqhs) depuis quinze ans

Les thématiques des Jiqhs ont évolué au fil des années avec un fil rouge qui ne s’est pas démenti autour du patient :

  • 2010 : Le patient au cœur des Jiqhs
  • 2015 : Les nouveaux territoires de la qualité
  • 2016 : Le système de santé en (R)évolution
  • 2017 : Les nouveaux territoires de la qualité et de la gestion des risques en santé
  • 2018 : De la qualité à l’efficience
  • 2019 : Ma santé 2022, ma qualité 2022 – Les nouveaux parcours de la qualité
  • 2021 : Qualité et résilience des systèmes de santé
  • 2022 : La qualité à l’épreuve des faits et des résultats
  • 2023 : Construire ensemble les différentes briques de la qualité et de la sécurité pour les usagers et les professionnels du système de santé

Enjeux, missions et outils de la Haute Autorité de santé

Le Pr Collet, président de la HAS depuis avril 2023 en a présenté les principaux enjeux. Il a rappelé qu’elle assurait une expertise qualité pour l’ensemble du système de santé, la santé étant définie au sens de l’Organisation mondiale de la santé qui inclut les domaines sanitaire, médico-social et social. La HAS est une « autorité publique indépendante à caractère scientifique dotée de la personnalité morale1 », la plus haute forme d’autonomie juridique. Se substituant à l’Agence nationale d’accréditation et d’évaluation de la santé (Anaes) en 2004 avec un périmètre de missions nettement élargi, elle s’est vue confier l’évaluation scientifique des pratiques médicales et des processus diagnostiques et thérapeutiques. Elle veille à respecter les trois valeurs qui guident son action : rigueur scientifique, indépendance et transparence. La HAS apporte son expertise pour l’évaluation de la qualité des établissements et des produits, l’élaboration des indicateurs de qualité et de sécurité des soins (IQSS), la certification des établissements de santé, l’évaluation des établissements et services médico-sociaux, ainsi que l’accréditation médicale. Elle a donc trois missions clés : évaluer les médicaments, dispositifs médicaux et actes en vue de leur remboursement, recommander les bonnes pratiques professionnelles et élaborer des recommandations de santé publique, et mesurer et améliorer la qualité dans les hôpitaux, les cliniques, les structures sociales et médico-sociales et la médecine de ville. La HAS dispose de trois outils principaux pour développer la qualité dans le système de santé : la certification des établissements de santé, en évolution constante et, plus récemment, l’évaluation des établissements et services médico-sociaux, l’accréditation des activités à risques, et la proposition d’indicateurs de qualité et de sécurité des soins mobilisables pour l’incitation financière à la qualité des soins (Ifaq). L’accréditation des équipes médicales, devient un enjeu essentiel, qui doit être encouragé, et a fait l’objet d’un atelier spécifique. Les ateliers qui se sont tenus pendant les deux jours ont offert des séquences de travail approfondies sur les différentes dimensions de la politique qualité (Encadré 2).


Encadré 2 – Les ateliers des Journées internationales de la qualité hospitalière et en santé (Jiqhs) 2023

  • Atelier 1 : Les enjeux du bien travailler en équipe
  • Atelier 2 : Le design comme catalyseur de l’expérience patient
  • Atelier 3 : Le déploiement du nouveau système d’évaluation dans les établissements médico-sociaux
  • Atelier 4 : L’accréditation des équipes : comment promouvoir son développement ?
  • Atelier 5 : Maîtriser nos risques, apprendre de nos erreurs avec l’ensemble des parties prenantes : les expériences du challenge « Ensemble, agissons pour la sécurité des soins »
  • Atelier 6 : L’intérêt de formaliser un projet usager dans une démarche qualité et institutionnelle
  • Atelier 7 : L’incitation financière à la qualité produit-elle davantage de qualité ?
  • Atelier 8 : PROMs et CROMs*
  • Atelier 9 : Les nouveautés de la certification
  • Atelier 10 : Qualité et sécurisation du circuit des produits de santé
  • Atelier 11 : Comment le numérique soutient les établissements de santé dans leur recherche de qualité ?
  • Atelier 12 : Anticiper les situations sanitaires exceptionnelles pour mieux les gérer

* Patient et Clinician-Reported Outcome Measures, mesures des résultats déclarés par le patient ou le médecin.


Enjeux philosophiques de la qualité

Le très bel éditorial de Flora Bernard paru dans Risques & Qualité en mars 20242 reproduit le regard philosophique porté sur la qualité des soins qui a permis un temps de réflexion partagé en fin de première matinée, poursuivi par l’intervention d’Alexandre Berkesse s’interrogeant sur le « pourquoi et comment travailler la pertinence en partenariat avec les usagers ? », dès lors que l’on considère que la qualité n’est pas un absolu et qu’elle implique une présence authentique entre la personne soignante et le patient.

La contribution grandissante des parcours de santé à la politique qualité

L’introduction du deuxième jour avait pour ambition d’élargir le champ de la qualité aux parcours de santé et à leur intégration dans une dimension stratégique plus vaste autour de la responsabilité populationnelle, et de situer cette évolution tant dans un contexte de développement des pathologies chroniques et du vieillissement de la population qu’au niveau mondial.

Intégration des soins en Belgique

François Perl, conseiller stratégique pour la Mutualité Solidaris Wallonie, a présenté l’émergence du modèle belge avec des soins intégrés pour des soins de qualité. Les autorités belges ont tenté il y a quelques années de changer de paradigme au niveau de l’assurance maladie, dans un contexte de carences de la première ligne dans un environnement organisationnel marqué par l’hospitalocentrisme, de défi budgétaire et de gestion par objectifs de soins de santé, en proposant un nouveau modèle organisationnel qui permette d’aller plus loin dans l’intégration des soins. Suite à la signature en 2016 d’un protocole d’accord entre l’État fédéral et les régions sur les soins intégrés, douze projets pilotes ont été lancés, avec l’ambition de déployer un modèle de soins intégrés. Celui-ci suppose à la fois de territorialiser (taille pertinente du territoire, gouvernance, stratification des risques), d’associer les prestataires et de renforcer la première ligne (pas de soins intégrés sans une première ligne consolidée et sans hôpitaux). Les facteurs de réussite sont de nature diverse : prise de conscience que le système doit changer, nécessité d’un soutien politique à la démarche qui favorise le consensus, existence d’une culture de coordination (mais inégalement répartie), existence d’un maillage territorial des prestataires et des institutions (mais en tension), disponibilité des données de santé (essentiellement liées à la facturation des actes), expérience des dossiers partagés (réseaux santé régionaux) et possibilité d’intégrer des acteurs existants qui bénéficient d’une grande expérience en matière d’accompagnement et de soins (aide et soins à domicile, initiatives hospitalières). Les enjeux sont de passer à une approche populationnelle avec une évolution des modes de financement.

Parcours de soins et parcours de santé

La table ronde a réuni trois experts des parcours de santé intervenant selon des angles de vue différents et complémentaires : Marie-Aline Bloch, professeur honoraire à l’École des hautes études en santé publique (Ehesp) a ainsi présenté l’évolution des parcours de santé à partir de ses nombreux travaux de recherche. Le Dr Amélie Lansiaux, directrice de l’amélioration de la qualité et de la sécurité des soins à la HAS, a rappelé les principaux travaux menés par la HAS relatifs aux parcours de soins. Le Dr David Laplanche, conseiller médical du programme de responsabilité populationnelle piloté par Antoine Malone de la FHF, a pu illustrer comment le programme de responsabilité populationnelle qui est expérimenté depuis 2018 sur deux parcours permet de rendre opérationnelle la mise en œuvre des parcours de santé par les acteurs des territoires. La notion de parcours de soins est apparue au début des années 2000 au niveau des soins de premiers recours. Elle s’est progressivement élargie à la notion de parcours de santé, voire de parcours de vie, qui s’est développée par opposition au parcours de soins standardisé. Les plans nationaux de santé publics qui se sont succédé (cancer, accident vasculaire cérébral [AVC], psychiatrie et santé mentale, Alzheimer…) ont tous repris cette notion de parcours de santé et de vie. Une approche par les parcours implique d’accroître la variété de l’offre de services, de façon plus coordonnée entre acteurs de santé, pour une personnalisation qui contribue à une amélioration de la prise en charge des patients ou des résidents. L’objectif devient une amélioration de la continuité des soins et de la fluidité des parcours entre le sanitaire et le médico-social, l’hospitalier et le premier recours, l’hospitalisation et le domicile. Il est demandé aux acteurs de santé plus de coordination autour et avec le patient et le résident. Dans son rapport de 2012, le Haut Conseil pour l’avenir de l’assurance maladie a élargi la notion de parcours à l’ensemble des situations chroniques à travers le vocable « parcours de santé ». Aujourd’hui, et après la crise de la Covid-193 qui l’a remis en exergue, le parcours de santé est devenu un concept inscrit dans les politiques publiques de santé et qui concourt à la qualité des soins. Dans le cadre de ses missions de promotion de la qualité et de la sécurité des soins, la HAS est engagée depuis 2004 sur le sujet des parcours, au cœur des enjeux et de l’évolution du système de santé. Cette priorité a été réaffirmée dans son projet stratégique 2019-2024 « Promouvoir des parcours de santé et de vie efficients ». La HAS contribue, depuis de nombreuses années, à la définition de parcours de soins des patients atteints de maladies chroniques dans un objectif d’amélioration de la qualité de vie de la personne et du pronostic de la maladie et conformément à ses recommandations. En 2018, une nouvelle dynamique s’est instaurée avec le chantier 4 de la stratégie nationale de santé « Ma santé 2022 » et l’élaboration de parcours de soins assortis d’indicateurs pilotés par la HAS et la Caisse nationale d’assurance maladie, destinés à être mis en place par une ou plusieurs agences régionales de santé (ARS) pilotes et, in fine, généralisés. Plusieurs thématiques de parcours ont été programmées : broncho-pneumopathie chronique obstructive [BPCO], maladie rénale chronique, syndrome coronarien chronique, obésité de l’enfant et de l’adulte, épilepsie, AVC, diabète de type 2… La démarche d’élaboration des guides relatifs à ces parcours est participative. Elle comprend des professionnels, des usagers, et des représentants des ARS et de l’Assurance maladie. Ces guides ont une visée opérationnelle d’amélioration de la qualité des parcours en s’appuyant sur les recommandations et les données de santé disponibles. Accessibles sur le site de la HAS, ils apportent également une aide à l’utilisation de questionnaires de mesure des résultats de soins pour les patients (Patient-Reported Outcome Measures, dits PROMs) pour améliorer la pratique clinique courante.

Parcours de santé et responsabilité populationnelle

La démarche de responsabilité populationnelle a la particularité de s’appuyer sur des référentiels de parcours, tout en favorisant leur appropriation par une dynamique d’acteurs au niveau territorial, la rendant à la fois opérationnelle, adaptée à chaque territoire et impliquant une synergie entre tous les acteurs. « La responsabilité populationnelle implique l’obligation [pour l’ensemble des acteurs de santé d’un territoire] de maintenir et d’améliorer la santé et [le] bien-être de la population d’un territoire donné en rendant accessible un ensemble de services sociaux et de santé pertinents, coordonnés, qui répondent de manière optimale aux besoins exprimés et non exprimés de la population », selon l’Institut national de santé publique du Québec. La méthode retenue consiste en l’élaboration et en la mise en œuvre de programmes d’action partagés, basés sur les besoins de la population et visant à maintenir les personnes dans le meilleur état de santé possible, de la prévention jusqu’aux maladies complexes, pour viser collectivement l’excellence clinique : le bon service, pour la bonne personne, au bon moment, au bon endroit. Elle répond ainsi au quadruple objectif d’un système de santé intégré tel que défini par Berwick en 2010 : le meilleur état de santé pour la population, pour une meilleure prise en charge pour les patients, au meilleur coût pour la société, tout en favorisant une meilleure attractivité pour les professionnels. Cela implique notamment la primauté de l’excellence clinique et la possibilité de s’améliorer en continu pour l’ensemble des professionnels. En France, le prototype d’un système de santé territorial basé sur la responsabilité populationnelle et l’intégration clinique a fait l’objet d’un programme expérimental « Territoires pionniers de la responsabilité populationnelle » piloté par la FHF. Ces territoires sont construits pour intégrer nécessairement un groupement hospitalier de territoire (GHT), mais aussi pour couvrir l’ensemble de la consommation de services des usagers dans tout type d’établissement, dans tous les champs (médecine, chirurgie, obstétrique, hospitalisation à domicile, soins de suite et de réadaptation, psychiatrie…). S’ils sont construits autour des GHT, ces territoires visent avant tout à permettre à l’ensemble des acteurs de santé de mieux travailler ensemble, par une gouvernance partagée entre ville et hôpital et par des programmes d’action locaux qui vont de la prévention aux patients complexes. Deux populations sont aujourd’hui ciblées : les patients atteints de diabète de type 2 et les insuffisants cardiaques.

Parcours de santé et fin de vie

Une table ronde animée par le Pr Bertrand Guidet, président du comité éthique de la FHF et chef de service de médecine intensive-réanimation à l’hôpital Saint-Antoine à Paris, a illustré l’importance que doit jouer la société pour améliorer la prise en charge des patients en fin de vie et du très grand âge. La volonté de la personne doit être privilégiée dans cet ultime parcours de vie, qui va au-delà de la santé mais qui mobilise fortement la formation et la culture en soins palliatifs, ainsi que les équipes de soins et médico-sociales.

L’intégration du management de la qualité dans le pilotage stratégique des établissements de santé

La qualité au cœur de la stratégie des établissements

Une table ronde a réuni quatre participants représentant la gouvernance interne des établissements et les usagers, tous experts visiteurs, qui ont fait part de leur riche expérience et de leur analyse des évolutions profondes de la politique qualité. La qualité devient un enjeu managérial majeur dans les établissements de santé avec la certification, qui constitue désormais un temps fort dans la vie des établissements. Jean-Christophe Rousseau, directeur général adjoint du centre hospitalier universitaire (CHU) de Limoges et vice-président de la commission qualité de la conférence des directeurs généraux (DG) de CHU présidée par Anne Costa, DG du CHU de Poitiers, est intervenu pour partager l’enjeu stratégique de la certification. Plus de vingt ans après le lancement des démarches qualités qu’il a pu porter dans des fonctions de directeur qualité au début de sa carrière, il a pu mesurer l’évolution de l’impact de la certification, qui passe progressivement d’une culture médicale encore très marquée par une approche individuelle à une logique d’équipe et collective, à un niveau institutionnel. Pour les présidents de commission médicale d’établissement (PCME), représentés par le Dr Jean-Marc Faucheux, PCME du centre hospitalier d’Agen et coprésident de la commission qualité, usagers, pertinence des soins et gestion des risques de la FHF, il y a une véritable responsabilité à piloter la qualité au niveau institutionnel le plus stratégique, au regard tant des enjeux que du sens pour les professionnels de santé. Il a souligné l’indispensable mobilisation des PCME en souhaitant qu’ils soient de plus en plus nombreux aux Jiqhs, car la qualité fait partie intégrante des projets médicaux. Julien Dubois, directeur des soins et coordonnateur général aux Hôpitaux du massif des Vosges, représentant de l’association départementale des directeurs de soins présidée par Laurence Laignel et directeur de la qualité et des relations avec les usagers, a rappelé combien la direction des soins peut agir rapidement sur l’organisation des soins. La politique qualité est une dimension à part entière de la commission des soins infirmiers, de rééducation et médico-techniques (CSIRMT) et du projet de soins. Les cadres de santé sont formés à la démarche qualité et ce sont eux, le plus souvent, qui soutiennent l’apprentissage par l’erreur, en encourageant les signalements et les retours d’expérience, et favorisent la mise en œuvre du plan d’action qualité. La qualité occupe une dimension managériale forte au niveau d’un service ou d’un pôle. Pour Chantal Cateau, représentante des usagers, membre de France Assos Santé et coprésidente de la commission qualité, usagers, pertinence des soins et gestion des risques de la FHF, le rôle des représentants des usagers est essentiel et complémentaire à celui des équipes qualité et des soignants pour valoriser la politique qualité. La place des usagers et de leurs représentants s’amplifie. Ces derniers doivent investir tous les niveaux de gouvernance. Certains établissements ont intégré un représentant des usagers au sein de leur directoire. Les représentants des usagers sont partie prenante de la politique qualité, qui s’articule étroitement avec le projet des usagers.

Faire face aux risques de non-certification

Le renforcement de la dimension stratégique de la qualité bouscule la gouvernance. La qualité des soins se situe au cœur de la stratégie d’un établissement avec le processus de certification. Plus qu’une obligation réglementaire, elle devient une exigence impérieuse. Pour un établissement de santé, les conséquences de la non-certification sont majeures : moindre mobilisation des équipes et moindre dynamique managériale de l’ensemble d’un établissement de santé ; réticence des patients qui tiennent compte des résultats de certification et des indicateurs qualité dans le choix d’un établissement et donc de son image de marque ; impacts vis-à-vis de l’autorité régulatrice que sont les ARS au regard des conditions de sécurité sanitaire et du nouveau régime des autorisations, dont les dimensions qualité et sécurité se renforcent tant dans les conditions d’implantation que dans les conditions techniques de fonctionnement. L’obtention de la certification est une réussite collective, une reconnaissance de la qualité du travail réalisé, et un moment de célébration de la mobilisation du collectif. Dès lors que le résultat n’est pas atteint, et quels que soient les indicateurs à améliorer, c’est l’ensemble d’un établissement qui est concerné. Comment alors s’appuyer sur ce résultat et comment rebondir ? Comment remobiliser des équipes, pour impulser les changements nécessaires, trouver les leviers, mobiliser les alliés qui vont permettre de dépasser cette étape ? L’ensemble des équipes doit pouvoir s’appuyer sur une culture de la résilience. Parmi les leviers nécessaires pour obtenir la certification ou lever des conditions suspensives, il convient de citer :

  • le délai donné par la HAS pour remobiliser les équipes et atteindre les résultats attendus ;
  • la possibilité de transmettre une note de contexte à la HAS ;
  • l’impulsion de la direction générale, et un pilotage facilité pour la hiérarchisation, avec les directions transversales, des projets qui concourent à la qualité et qui relèvent parfois de dimensions techniques : équipements, système d’information hospitalier… ;
  • la mobilisation de la communauté médicale et de sa présidence ;
  • la synergie entre direction de la qualité et direction des soins ;
  • une bonne communication sur les enjeux, la démarche et le calendrier de la certification ;
  • le recours éventuel aux structures régionales d’appui (exemple du Comité de coordination de l’évaluation clinique et de la qualité en Nouvelle-Aquitaine [Ccecqa]), à leurs ressources et au regard extérieur qu’elles apportent en complément de ceux des ARS.

Participation des usagers à la politique qualité

La participation des représentants des usagers est aujourd’hui pleinement acquise. Ils doivent être associés à la genèse du plan d’action, avec l’intégration de celui-ci dans le projet des usagers. De même, leur présence dans les différentes commissions de la CME (comité de lutte contre les infections nosocomiales, comité de liaison en alimentation et nutrition, comité de lutte contre la douleur…) apporte une dimension supplémentaire à la sensibilisation du personnel à la qualité et à la sécurité des soins au long cours. Car l’enjeu est maintenant de dépasser la fréquence institutionnalisée (tous les quatre ans) de la certification pour mobiliser les acteurs en continu.

Certification et groupements hospitaliers de territoire

Les visites de certification regroupées pour les établissements d’un GHT facilitent le travail en commun des établissements, qui se traduit par le développement de directions de la qualité et de la gestion des risques transversales. C’est un facteur clé de soutien des établissements qui ont besoin d’une expertise plus poussée, de même qu’un soutien à la généralisation de l’évaluation qualité dans le secteur médico-social. L’enjeu de la territorialisation se développe et prend tout son sens avec la structuration de filières de soins graduées et sécurisées ainsi que des parcours de santé. La dimension territoriale devrait être renforcée dans les nouveaux référentiels.

En synthèse

Les Jiqhs 2023 ont permis de mettre en perspective l’évolution de la politique qualité depuis vingt-cinq ans et d’en dresser des perspectives pour les prochaines années. La politique qualité a acquis une dimension stratégique avec le déploiement de la certification des établissements de santé, et aujourd’hui de l’évaluation des établissements et services sociaux et médico-sociaux, ou plus récemment de la part progressive accordée au financement à la qualité. Enjeu stratégique et managérial, la culture qualité s’est imposée, à l’instar de la gestion des risques qui s’étend sur un champ toujours plus vaste (circuit du médicament, système d’information, situations sanitaires exceptionnelles…). Elle devient un levier managérial essentiel du travail en équipe et du sens afin que les professionnels trouvent toujours un intérêt fort dans leur métier auprès des patients. Ces derniers s’acculturent également à ces nouvelles dimensions, où leur avis et leur expérience sont de plus en plus recherchés pour améliorer leurs parcours de santé, parcours eux-mêmes vecteurs de qualité, dans une dimension populationnelle.

Notes :

1- Article L.161-37 du Code de la sécurité sociale.
2- Bernard F. La valeur de la qualité des soins : un regard philosophique. Risques Qual. 2024;21(1):3-4.
3- Coronavirus disease 2019, maladie à coronavirus 2019.

Prochaines Jiqhs

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